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Thursday, July 16, 2020

Le blé dur des Suisses vient de la Saskatchewan - Le Temps

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On dit que les champs de blé de la Saskatchewan s’étendent sur des prairies, planes et fertiles, à perte de vue dans un climat aride. Cette province du centre du Canada, grande comme quinze fois la Suisse mais huit fois moins peuplée, recense 18,2 millions d’hectares de cultures, plus de quatre fois la surface de la Confédération. L’hiver, il fait vite -40°C, de quoi prévenir les infestations d’insectes. L’été, les chaleurs peuvent être extrêmes, de quoi cultiver un blé dur riche en gluten et à la couleur idéale pour faire des pâtes jaunes qui ne brunissent pas: celles que le consommateur recherche.

La Saskatchewan est le principal producteur de blé dur au monde, une denrée quasiment uniquement destinée à l’exportation. Ces dernières décennies, sa production s’est développée au même rythme que la consommation de pennes et de nouilles dans le monde. Mes spaghettis M-Budget sont faits avec les céréales de la Saskatchewan. Chaque année, la majorité du blé dur importé en Suisse en vient.

«Nous importons quasiment tout le blé dur de là-bas, indique Thomas Schmid, responsable des achats stratégiques chez M-Industrie, rencontré à Zurich. Nous privilégions celui du Canada pour des questions de qualité et de stabilité.» De temps à autre, la fusariose, une maladie fongique, cause des dégâts sur place, et les importateurs sont amenés à regarder également ailleurs, en Australie notamment, voire en Suisse. Mes spaghettis contiennent par exemple aussi du blé dur français et autrichien.

Cultures symboliques en Suisse

En Europe, l’Italie, la France, la Slovaquie et l’Autriche en cultivent aussi, mais la nation des pâtes utilise la quasi-totalité de sa production tandis que la qualité, dans les autres pays, est variable. La Suisse a elle aussi lancé quelques cultures, à Genève et à Schaffhouse, mais en quantités symboliques.

Au Canada, les céréales sont transportées dans de gigantesques trains, de la Saskatchewan et de l’Alberta, la province voisine, vers des élévateurs à grains où elles sont réparties en plusieurs catégories de qualité. Le blé acheté par Migros transite en général par le port de Thunderbay, au bord du lac Supérieur, le plus important des Grands Lacs d’Amérique du Nord, où se trouvent plusieurs de ces appareils.

Les cargaisons sont chargées sur des Seawaymax, des navires de 30 000 tonnes avec les dimensions requises pour emprunter les écluses du Saint-Laurent. «Deux envois par an sont organisés, avant le gel de l’hiver, en octobre, et après la fonte des glaces, en avril-mai», indique Pierre Akribas, le patron de GAP SA, une société de négoce à Greng, près du lac de Morat, qui importe du blé dur d’une bonne partie de l’Europe et compte Migros parmi ses clients. J’en ai appris l’existence au détour d’une conversation. En général, le distributeur orange a besoin de quelques compartiments dans un bateau, et se contente d’une livraison par an.

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Les navires passent au large de Halifax et arrivent après trois semaines de trajet à Rotterdam, à Amsterdam ou au port de Gand, avant de descendre le Rhin et d’être déchargés à Bâle. Récolté à la fin de l’été, le blé dur arrive souvent en fin d’année, quand le niveau du Rhin est bas, ce qui peut occasionner des retards. Il est stocké à Bâle pendant un et deux ans – de quoi avoir des réserves – avant d’être livré, dédouané et transféré dans un moulin de M-Industrie, en Argovie.

La production française transite en général aussi par la mer. Les prix sont similaires, car les coûts du transport sont minimes et parce que Berne a signé un accord de libre-échange avec Ottawa. Il n’y a pas de contingent sur le blé dur, sauf s’il est utilisé pour autre chose que des pâtes, car on en produit à peine en Suisse.

Cette année, les statistiques douanières laissent entendre que le blé dur continue d’arriver, chaque mois – en réalité, de petites quantités sont régulièrement dédouanées des stocks, selon la demande, mais les arrivages ont lieu une à deux fois par an –, largement, du Canada. Les volumes sont en baisse mais dans des proportions non significatives.

Impact quasi nul

«La pandémie n’a eu quasiment aucun impact, assure Pierre Akribas. Il faudrait un shutdown de 12 mois pour avoir des problèmes. Nous avons d’importants stocks, jusqu’à 24 mois de réserves, et des possibilités ailleurs dans le monde. Le blé dur consommé en Suisse cette année était arrivé avant la pandémie.» Le seul souci logistique est venu d’Europe, où les camionneurs ont pu manquer – bloqués à la frontière ou déclarés malades – ou avoir du retard, ce qui a occasionné des ralentissements. Un élévateur à grains à Vancouver a fermé ses portes temporairement, en raison de cas de Covid-19 parmi le personnel.

Durant le confinement, les commandes de GAP en Europe ont plutôt baissé, car la hausse des achats de pâtes du côté de la grande distribution n’a pas compensé la chute des ventes due à la fermeture des cantines et des restaurants. «Les achats chez Migros ont beaucoup augmenté de mars à mai, mais on avait beaucoup de stocks, suffisamment pour ne pas procéder à une commande pour les livraisons de printemps», indique Thomas Schmid.

A la fin de juin, les autorités statistiques canadiennes ont indiqué que 25 millions d’acres (1 acre équivalant à environ 1 demi-hectare) de blé ont été plantées en 2020, une hausse de 1,5%, largement due aux cultures de blé dur, qui ont augmenté de 16,2% à 5,7 millions d’acres.




July 16, 2020 at 04:16PM
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