Tandis que le soleil promet encore de rayonner sur la France pendant une bonne semaine, les moissons sont déjà bien engagées dans plusieurs régions du pays et les rendements sont décevants. Les premières récoltes donnent à penser que la production de blé tendre en France sera inférieure de 20% à la moyenne des cinq dernières années et de 30% à 35% en dessous de celle de 2019 dans certaines régions. Ces rendements décevants sont imputables aux conditions climatiques qui furent globalement défavorables depuis le début de l’automne 2019. Dans un premier temps, les semis d’automne ont tardé à germer dans des sols trop secs. Dans un second temps, les pluies devenues quotidiennes ont parfois inondé les champs et pourrit le blé en herbe tandis qu’il a fallu repousser au printemps une partie des semis que l’on devait faire en automne.
Au printemps, le temps sec de mars et avril a retardé la levée des semis, tandis que les corbeaux et autres volatiles profitaient de la situation pour se gaver à bon compte. Ce fut le cas pour le blé de printemps, mais aussi pour l’orge, le maïs et même le tournesol qui sert à produire de l’huile. Plus tard, des gelées tardives sont intervenues dans certaines régions au moment ou les végétaux produisaient « leurs cellules sexuelles » une période qui ne dure que quelques jours. Deux mois plus tard, il suffit d’observer les épis à l’approche de la moisson pour constater que certains sont remplis de grains, tandis que d’autres sont totalement vides bien que d’apparence normale au premier regard. Comme le printemps a connu des pics de chaleur qui ont favorisé le stress hydrique, on constate aussi que beaucoup d’épis portent cette année des grains très rabougris avec peu de farine à l’intérieur.
Baisse sensible des surfaces au Royaume Uni
Pour le moment, on ne sait pas trop quelles sont les prévisions de récolte pour l’ensemble des pays membres de l’Union européenne. Mais ils ne sont pas bons dans le pays qui a décidé d’en sortir. En raison d’une forte pluviométrie durant l’automne 2019, les semis de blé tendre au Royaume Uni sont passés de 1,8 million d’hectares pour la récolte de l’an dernier à 1,2 million d’hectares pour celle de cette année. Il y aurait actuellement entre 300.000 et 400.000 hectares de terres céréalières en jachère non voulue de l’autre côté de la Manche. Enfin, comme la France, le Royaume Uni a connu des périodes de sécheresse et de forte chaleur à plus de 30°C dans ses zones céréalières au printemps, ce qui va faire chuter les rendements.
La Russie pourrait limiter ses exportations
Depuis un an, le prix de la tonne de blé tendre a fluctué entre 170 et 190€ la tonne rendue au port de Rouen pour l’exportation. Cela donne un prix moyen inférieur de 10% à celui des douze mois précédents. Comme les stocks de report sont conséquents au niveau mondial, les spéculateurs n’ont pas éprouvé le besoin de spéculer à la hausse pour le moment. Mais, si la récolte de 2020 devait être nettement moins bonne que ne le laissaient prévoir les estimations, la spéculation pourrait repartir. Comme elle l’a déjà fait ces derniers mois, la Russie a annoncé qu’elle pourrait, l’an prochain, instaurer des quotas d’exportation en seconde partie de campagne, afin de garantir sa consommation intérieure. Mais cela peut aussi être vu comme un argument de vente en début de campagne, le blé russe ayant généralement un taux élevé de protéines très apprécié des pays importateurs.
Néanmoins, il conviendrait de tirer des leçons de cette situation mondiale incertaine. La chute des rendements en 2020 nous indique que le réchauffement climatique rendra de plus en plus incertaines les récoltes de denrées alimentaires dans les prochaines décennies. Par ailleurs, l’absence de politique visant à constituer des stocks mondiaux de report chaque année au moment de la récolte peut déboucher sur des risques de pénuries et des spéculations à la hausse. On n’a toujours pas tiré les leçons des émeutes de la faim des années 2007-2008. En attendant, le métier des paysans chargés de produire notre nourriture quotidienne est rendu de plus en plus anxiogène faute d’avoir des prix permettant de couvrir les coûts de production.
July 15, 2020 at 05:00AM
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Vers une très faible récolte de blé français en 2020 - L'Humanité
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